
Réplique culte :
L’humiliation qu’il avait subi ne pouvait être balayé par cet acte très simple d’annihilation : le meurtre…
Sortie : 28 octobre 1982 en Italie,
27 avril 1982 en France
Titre original : Tenebre
Réalisation : Dario Argento
Scénario : Dario Argento
Distribution : Anthony Franciosa, John Saxon, Daria Nicolodi
Synopsis :
Un écrivain populaire américain, Peter Neal, spécialisé dans la série noire, se rend à Rome pour faire la promotion de son dernier best-seller: Ténèbres. Dès son arrivée, plusieurs personnes sont assassinées selon un schéma comparable à celui des meurtres qui jalonnent son roman. Pire, le meurtrier enfonce une page de Ténèbres dans la bouche de chaque victime. L’enquête progresse, mais le présumé coupable ne tarde pas à périr lui aussi…

Ténèbres est-il le Giallo ultime? La réponse pour moi est oui. Car le film répond à tous les codes du genre. Et ce avec brio…
1982
Fini les jeux de lumières picturaux du flamboyant Inferno ou encore de l’ensorcelant Suspiria, Argento missionne Luciano Tovoli, son directeur de la photographie fétiche, pour créer une ambiance froide, un voyage en clair-obscur aux nuances bleutées, une plongée dans les quartiers les plus modernes de Rome, à l’époque.
L’architecture d’un blanc percutant, mise en valeur par une lumière crue, nous laisse entrer dans un labyrinthe urbain ou le tueur au rasoir peut surprendre à chaque coin de rue, à l’ombre d’un parc, dans une maison inoccupée… Ténèbres, au-delà d’un récit policier sans grand génie, est avant tout une nouvelle expérience des sens et au détour une cruelle analyse de l’âme humaine et de ses tourments. Ténèbres prend racine dans la propre histoire de Dario Argento, peu de temps auparavant harcelé au téléphone par un de ses fans au comportement obsessionnel.
De cette expérience traumatisante, le maestro italien propose une mise en abîme teintée d’ironie dans un univers ultraviolent, qualifié à l’époque de charge misogyne. Mais il serait trop facile et réducteur de cantonner Argento derrière un personnage en conflit avec la gent féminine. A l’instar d’Alfred Hitchcock, un de ses modèles assumés, Dario Argento aime les femmes, et transpose à l’écran sa fascination à leur égard. Il les dépeint comme femme fatales mais aussi femmes blessées.

Dans Ténèbres, nous suivons le parcours d’un tueur, s’inscrivant dans la pure tradition du Giallo, qui assassine de sublimes femmes brunes au regard hypnotique. Il les qualifie de perverses et s’inspire des crimes racontés dans les ouvrages d’un écrivain à succès. Ténèbres n’est pas avare en surprises et Argento joue encore une fois avec l’œil du spectateur. Il s’agira d’un de ses derniers grands films, à l’aube des années 80 en pente descendante pour le cinéaste.
Comme sur ses films précédents, il dirige également des acteurs américains Anthony Franciosa et John Saxon (père d’Heather Langenkamp dans « les Griffes de la Nuit » de Wes Craven).
Soyons honnêtes… Ténèbres ne vaut pas par sa distribution. Même si Anthony Franciosa est un excellent personnage principal. Et les sublimes Argento girls, passant sous la lame du tueur ganté irradient l’écran de par leur beauté magnétique (Mirella d’Angelo, Lara Wendel, Ania Pieroni revenue d’Inferno… ). Notons également à nouveau la présence de Daria Nicolodi, son illustre compagne, muse et mère d’Asia.
Il serait plus que regrettable de parler de ténèbres sans évoquer le score de Goblin, groupe totalement complémentaire avec l’univers d Argento (tout comme un Tim Burton avec Danny Elfman). 3ème collaboration du groupe avec le cinéaste (après la parenthèse Keith Emerson sur « Inferno »), le score de Ténèbres délaisse l’univers onirique et fantastique de Suspiria pour laisser à une œuvre électronique anxiogène, à l’image du film.
Le thème principal marquera les esprits tandis que les tracks suivantes nous plongeront comme promis dans une virée au cœur des ténèbres.
Les plus curieux noteront sur l’affiche que le nom Goblin n’apparaît pas. Cela s’explique par un contexte de réunification partielle du groupe, dû au départ des membres Massimo Morante et Claudio Simonetti en 1978, en pleine gloire de la formation.
Ce que j’aime :
- La sublime photographie de Luciano Tovoli.
- La radicalité assumée du film dans son ton.
- Le score de Goblin.
- La mise en scène toujours hyper inventive d’Argento.
- Le respect total des codes du Giallo.
Ce que j’aime moins :
- Un jeu d’acteurs et d’actrices qui a mal vieilli.
- Un rythme parfois trop lent et des scènes tirées en longueur. Certains dialogues sont de trop.
- Une intrigue un peu trop classique.
Conclusion :
Ténèbres est bien le giallo ultime à voir. Il se hisse au top 1 des incontournables d’un genre aujourd’hui oublié, avec l’arrivée du slasher. Oubliez l’histoire, vivez le film comme une expérience sensorielle terrifiante au cœur d’une vision inédite de la cité Romaine. Ténèbres est un jeu de pistes immersif qui ne manquera pas de vous happer dans son univers si particulier.

© Victor Leblanc
WordPress:
J’aime chargement…